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Annulation de la vente : impacte de l’antériorité du défaut et le caractère avisé de l’acheteur
Il s’agit d’un arrêt de la première chambre de la Cour d’appel de Lyon datant du 3 septembre 2024 relatif à une demande de résolution de la vente en raison d’un vice caché.
Le 15 mars 2020, Mme [W] et la société Horse jumping ont acquis un cheval auprès de M.X. Le 12 mars 2020, une visite vétérinaire avant l’achat avait été organisée en c oncluant à l’existence d’anomalies sur le cheval. Le 19 juin 2020, Mme [W] a subi une chute suite au trébuchement du cheval. Le 24 juin 2020, le vétérinaire a diagnostiqué une pathologie touchant les cervicales du cheval. Ce dernier présente une inflammation chronique qui contre indique son utilisation dans un but compétitif. Par acte d’huissier du 19 novembre 2020, Mme W et la société ont assigné M. X devant le tribunal judiciaire en résolution de la vente sur le fondement des articles 1641 et suivants du Code civil, autrement dit la garantie des vices cachés.
La Cour d’appel de Lyon devait déterminer si l’acheteur d’un cheval pouvait demander la résolution de la vente dès lors que celui-ci présentait une pathologie le rendant inapte aux compétitions, en ayant tout de même connaissance du vice.
En matière de vente de cheval, à défaut de convention contraire, c’est la garantie du Code rural et de la pêche maritime prévue par l’article L.213-1 qui s’applique, exclusivement.
Or, cette garantie est particulièrement limitée puisqu’elle s’applique à une liste exhaustive de vices rédhibitoires et peut être actionnée dans un délai de seulement 10 jours à compter de la livraison.
Les Parties peuvent toutefois prévoir l’application de la garantie des vices cachés des articles 1641 et suivants du Code civil, soit par une disposition contractuelle expresse, ou de manière tacite.
Dans cette affaire, il n’y avait aucun contrat de vente, de sorte que la seule garantie a priori applicable était celle de la garantie du Code rural. Or, les acquéreurs ont fait valoir l’existence d’une convention implicite relative à la destination du cheval permettant l’application de la garantie des vices cachés des articles 1641 et suivants du Code civil, selon laquelle le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus.
L’acquéreur qui sollicite la résolution de la vente sur ce fondement doit établir qu’un vice inhérent du cheval, qui existait antérieurement à la vente, non apparent et dont il n’avait pas connaissance, compromet son usage normal.
Il revient donc à la Cour d’appel de statuer d’abord sur l’application de la garantie des vices cachés en l’absence d’un contrat de vente, puis sur les conditions de son application à la vente litigieuse.
En préambule, la Cour d’appel valide l’existence d’une convention contraire permettant de faire application de la garantie des vices cachés au motif que la destination convenue de « saut d’obstacles en compétition » ainsi que le prix de 45.000 euros suffisaient à caractériser la convention contraire implicite requise.
En outre, la Cour d’appel qualifie les acquéreurs comme des acquéreurs particulièrement avertis, car ils ont la qualité de professionnels de l’équitation.
De plus, les acquéreurs, pourtant avisés, qui ont été avertis préalablement à la vente de l’existence d’un risque pour l’usage qu’ils comptaient faire du cheval, à savoir la compétition de saut d’obstacle, n’ont pas décidé de faire pratiquer des investigations complémentaires, alors même que cette possibilité leur a été rappelée par le vétérinaire.
En effet, le vendeur avait communiqué une vidéo qui montrait le cheval en train de trébucher lors d’une compétition, préalablement à la vente.
Il y a donc lieu de considérer que les acquéreurs avaient connaissance de l’existence d’un vice affectant le cheval avant la vente et qu’elles ont accepté le risque qu’il ne puisse pas être utilisé pour l’usage auquel il était destiné, à savoir le saut d’obstacles.
Il s’agit d’une décision qui rappelle l’importance du contrat de vente dans les transactions de chevaux. En effet, depuis l’exclusion des chevaux de la garantie légale de conformité au 1er janvier 2023, le champ de garanties applicables à une vente s’est particulièrement rétréci, permettant au vendeur de limiter les risques de demande d’annulation d’une vente.
En effet, une clause permettant d’écarter expressément l’application de la garantie des vices cachés de l’article 1641 du Code civil aurait pu permettre au vendeur d’éviter cette procédure judiciaire en annulation de la vente.
Il est également possible d’insérer une garantie contractuelle dans le cadre d’une vente, adaptée et personnalisée pour convenir aux deux parties et permettre la résolution amiable d’un litige.